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N’diaye et ses bananes : l’histoire d’un combat perdu contre la cherté de la vie

Ce texte est un extrait du livre Monnaie, servitude et liberté de Tchundjang Pouemi (Joseph), publié en 1980 aux Éditions Jeune Afrique. Ce passage, publié par le confrère Global-Actu, raconte l’histoire de N’diaye, un cultivateur confronté à l’inefficacité du contrôle des prix. L’auteur critique cette mesure comme une solution inefficace contre l’inflation, soulignant que la cause de celle-ci réside dans la monnaie et non dans les prix eux-mêmes. Il évoque également l’importance de traiter les problèmes structurels sous-jacents, comme la faiblesse de l’agriculture, plutôt que de tenter de manipuler les prix à court terme. L’auteur compare cette situation à celle d’un médecin qui ne s’attaque pas à la cause de la maladie, mais se contente de casser le thermomètre. Lisez !

« N’diaye, cultivateur de son état, vivait tant bien que mal du produit de la vente des bananes de son champ au bord de la route qui va à la ville. Ce n’était pas facile, mais les enfants mangeaient à leur faim, le plus grand alors au collège, pouvait acheter sa tenue à la rentrée scolaire. Un jour, le gouvernement décida, pour combattre la cherté de la vie, de contenir les prix des denrées de base dans les ‘limites raisonnables’.

Pendant ce temps, l’inflation mondiale faisait augmenter les prix des produits importés. A la rentrée scolaire, N’diaye, ne pouvant plus payer les chaussures du collégien avec le produit de la vente des bananes, quitta le village et alla se faire gardien de nuit chez Bata. Tout alla mieux jusqu’au jour où il fut renvoyé. Ne pouvant plus vivre, N’diaye rentra au village. Le prix des bananes avait doublé entre-temps et on en trouvait plus. N’diaye a juré de ne plus jamais quitter la maison de ses parents.

Le contrôle des prix, en tant que moyen de lutte contre l’inflation, n’a jamais marché nulle part. La hausse des prix n’est que la manifestation de l’inflation, et non sa cause. La cause de l’inflation, c’est la monnaie. Pour que le contrôle des prix soit efficace, il faudrait contrôler tous les prix à tout moment. Le contrôle des prix développe la corruption.

La hausse des prix des denrées alimentaires est le signe que, face à la demande monétaire, la production ne suit pas.

Les prix sont un thermomètre de la santé de l’économie. Le bon médecin, ce n’est pas celui qui casse le thermomètre, c’est celui qui calme la fièvre, avec de l’aspirine, en subventionnant par exemple le bien dont le prix a tendance à monter, puis prend des mesures en profondeur pour tuer les microbes qui sont à l’origine du paludisme, notamment, en l’occurrence, la promotion du crédit agricole.

Malheureusement, les planificateurs, dans les pays en voie de développement, traitent l’agriculture en parent pauvre.

Le plus sûr moyen d’organiser la pénurie des produits vivriers, c’est d’en contrôler les prix. »

« Monnaie, servitude et liberté », Tchundjang Pouemi (Joseph), 1980

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